Découverts vers la fin des années 1960 et initialement appelés diphosphonates, les biphosphonates ont commencé à être commercialisés durant les années 1990. Ils inhibent les ostéoclastes, cellules osseuses ayant pour mission de nettoyer l’os devenu inutile (un peu à l’image du bois mort qu’on élaguerait sur un arbre). Ils ont dès lors pour but le renforcement des os. Leur usage ne fait qu’augmenter encore aujourd’hui.
Leur principale indication vise, très logiquement, les situations d’affaiblissement de la densité osseuse comme l’ostéoporose post-ménopausique, celle du sujetmasculin âgé ou celle résultant de l’usage prolongé des corticostéroïdes artificiels. A court terme, vu lamise à mal des ostéoclastes qui détruisent de l’os, les ostéoblastes fabriquant de l’os ont la part belle. Cela permet à la densité osseuse d’augmenter temporairement.
Toutefois, au bout de quelques mois à quelques années, l’architecture osseuse perd sa dynamique, celle qui lui permet de s’adapter continuellement aux changements structurels du squelette. Il suffit de regarder la silhouette d’individus âgés de 50, 60, 70, 80 ou 90 ans : on peut quasiment deviner leur âge d’après leur ombre chinoise.
On ne doit pas être un éminent physicien pour se rendre compte que cet os plus épais s’adapte mal aux nouveaux axes de pression résultant des modifications de l’architecture squelettique. Et arrive ce qui devait arriver, cet os incontestablement plus abondant devient en réalité plus fragile et… il casse même spontanément!
Je sais que cela paraît invraisemblable mais des études de plus en plus nombreuses soulèvent bien des interrogations sur ce plan : insuffisance osseuse du fémur, fractures subtrochantériennes atypiques, ostéonécrose de la mâchoire, échecs des implants dentaires font tous l’objet d’articles parus récemment dans les revues médicales.
On trouve même des taux de complications beaucoup plus élevés dans les réparations orthopédiques de ces fractures du fémur dites « atypiques ». Pire, des fractures malencontreuses surviennent pendant l’intervention chirurgicale ou dans son décours, autour des plaques de fixation : cela fait désordre… Il n’est pas plus rassurant de se rendre compte que beaucoup de dentistes spécialisés dans la pose d’implants dentaires refusent catégoriquement d’intervenir sur les patients traités par biphosphonates !
Enfin, pour clore cette première rubrique deseffets secondaires des biphosphonates, il nous faut souligner le fait que les fractures atypiquesvoient leur fréquence croître avec la longueur de la prise médicamenteuse… Alors, il convient de mentionner les autres effets secondairescomme ceux touchant l’orbite oculaire et le tractus digestif.
Il apparaît que le risque de développer une inflammation oculaire telles l’uvéite ou la sclérite augmente de 50%, même si ce risque reste statistiquement faible. L’irritation œsophagiennefréquemment ressentie après la prise des biphosphonates (très codifiée en ce qui concerne le jeûne et la position) semble augmenter le risque de cancer œsophagien, mais cela reste sujet à controverse (tout comme le risque de fibrillation auriculaire, une forme d’arythmie cardiaqueapparemment plus fréquente aussi).
Tout ceci fait l’objet de publications scientifiques que je vous invite à découvrir sur mon site internet www.gmouton.com, dans la rubrique « articles »sous le titre « 7h – The Biphosphonate Delusion ». Cet article en anglais traite de ce thème et il est rigoureusement référencé avec 14 publications datant toutes des années 2010 à 2012.
Alors, que faut-il conclure au sujet de l’utilisation des biphosphonates ? En tout cas, leurs indications exactes et la durée de leur prise devraient être réexaminées à la lumière de ces informations récentes. Dans le cas d’une femme ménopausée depuis peu chez qui on détecteune ostéopénie (stade précurseur de l’ostéoporose), est-il bien raisonnable de prendre desbiphosphonates qui vont densifier ses os pendant la cinquantaine mais les fragiliser pour les décennies suivantes, là précisément quand le risque fracturaire devient de plus en plus significatif ? Je vous laisse répondre…