La stéatose hépatique non alcoolique ou NASH (non alcoholic steatohepatitis) est une surcharge graisseuse du foie, sans rapport avec la prise d’alcool. C’est une pathologie que l’on pourrait typiquement classer dans les maladies de civilisation. Il existe des étiologies rares et spéciales mais la plupart du temps elle est liée à une hypertriglycéridémie, de l’obésité (abdominale) et à un état d’insulinorésistance ou de diabète de type 2. On peut tout simplement considérer la NASH comme une manifestation hépatique du syndrome métabolique. Dans certains cas (rares) cela peut aller jusqu’à la cirrhose.
Peut-on faire quelque chose au niveau alimentaire ?
Absolument car c’est justement une pathologie liée à la nutrition ! On va retrouver les grandes lignes des régimes que l’on utilise en cas d’excès de triglycérides ou pour le syndrome métabolique, à savoir :
- Avoir une alimentation hypocalorique permettant une perte de poids durable et une baisse de l’insulinorésistance. Privilégier les aliments à faible densité calorique comme les fruits et les légumes.
- Consommer des glucides avec modération. La baisse des calories doit se faire préférentiellement sur les glucides, plutôt que sur les lipides.
- Eviter les sucres simples, à l’exception de ceux présents dans les fruits.
- Choisir des aliments à index glycémique (IG) bas et bannir les aliments industriels à IG élevé.
- Consommer du bon gras : acides gras mono-insaturés (oméga-9), et surtout des oméga-3.
En pratique à quoi peut ressembler une journée type ?
Petit déjeuner
→ Riche en protéines et bon gras, sans glucides.
- Protéines : jambon ou filet de poulet ou de dinde ou yaourt de brebis ou yaourt de soja ou œuf.
- Bon gras, oméga-9 : amandes, noisettes, noix de cajou et de macadamia.
- Bon gras, oméga-3 : noix de Grenoble, graines de lin (si possible thermo-extrudées : Linette® ou Biomélin®), graines de chia et de chanvre.
Repas de midi
→ Riche en protéines, en fibres, modéré en glucides et à faible index glycémique.
- Entrée crudités, vinaigrette huiles de colza/olive (Tocoprotect®), avec graines de sésame ou tahin (voir explications au paragraphe sur le sésame).
- Viande maigre : poulet, dinde, lapin, parties maigres du porc (rôti, filet mignon), veau.
- Ou poisson : maigre ou gras.
- Légumes vapeur ou poêlés avec un tout petit peu d’huile d’olive (attention : sans dépasser 140°C).
- Féculents à IG bas en petite quantité : lentilles, pois chiches, flageolets, orge perlé, patate douce (2 fois moins que les légumes).
- Pain de seigle foncé, biologique et au levain. Eventuellement multicéréales.
- Attention : féculents OU pain Et en petite quantité.
- Yaourt (chèvre et brebis de préférence).
- Fruit frais peu sucré.
Collation dans l’après-midi
→ Aucune sucrerie superflue. A faire seulement si vraiment faim.
- Fruit frais de saison : une portion.
- Si encore faim : amandes ou autres oléagineux.
Repas du soir
→ Léger (faible en calories), frugal (s’arrêter de manger avant la satiété). Si pas de collation dans l’après-midi prendre ce repas le plus tôt possible.
- Entrée crudités, vinaigrette huiles de colza/olive
- Ou soupe.
- Légumes à volonté.
- Pas de protéines animales ou bien un tout petit peu de poisson.
- Féculents ou pain idem midi.
- Fruit frais peu sucré.
NB : populairement pour la perte de poids on enlève les féculents en fin de journée. Cependant on peut respecter une chronobiologie plus physiologique en les laissant le soir. On peut par ailleurs en cas de forte insulinorésistance les enlever à midi.
Vitamine E
La vitamine E est un traitement vraiment intéressant pour la NASH. Une méta-analyse japonaise a montré qu’elle permet de réduire les transaminases (ASAT, ALAT), la stéatose, l’inflammation mais aussi la fibrose chez les sujets atteints de NASH [1]. Par ailleurs une étude a révélé qu’une supplémentation en tocotriénols (une certaine forme de vitamine E) produit un effet hépatoprotecteur chez des individus atteints d’hypercholestérolémie et de NASH [2]. Les produits que je conseille particulièrement : Phytotrienol de Nutrixeal® (capsules) ou bien Tocoprotect Dr Jacob’s® (aliment fonctionnel : huile d’olive enrichie).
Sésame
Le sésame est un aliment de choix en cas de NASH. Une étude (sur la souris) a montré que l’huile de sésame permet de réduire la fibrose stéatohépatique en diminuant le stress oxydant, les cytokines inflammatoires, la leptine et le TGF-β [2]. Je conseillerais néanmoins plutôt les graines ou le tahin (purée de sésame) plutôt que l’huile.
Oméga-3
On sait que les oméga-3 diminuent la stéatose du foie [4]. Par contre on ne connait pas les quantités optimales. En ce qui concerne l’acide alpha-linolénique une consommation quotidienne d’huile de colza et de graines de lin permet de couvrir les besoins. Pour les oméga-3 à longue chaîne, EPA et DHA, les besoins physiologiques sont rarement couverts. Par ailleurs les doses efficaces en cas d’hypertriglycéridémie sont souvent bien plus élevées (1 à 3 g par jour). On peut conseiller la consommation bihebdomadaire de poissons gras (sardines et maquereaux, préférentiellement car les petits poissons sont moins pollués), mais une supplémentation s’avère généralement nécessaire. Les produits que je conseille particulièrement : Oménutrics Bionutrics®/Metagenics® pour un mix EPA/DHA ou bien Omégartic DHA (nutrixéal®), Omégabiane DHA (Pilèje®), Oméga DHA (LPEV) pour les formes concentrées en DHA.
Chardon-Marie
Cette plante a des propriétés hépatoprotectrices bien connues. En outre, elle permet d’abaisser l’insulinorésistance. Son intérêt tout particulier pour les patients atteints de NASH tient justement du fait qu’elle diminue la résistance à l’insuline ; la peroxydation lipidique et qu’elle restaure les niveau de glutathion (antioxydant endogène). C’est une plante incontournable pour l’amélioration de la stéatose et la régression de la fibrose [4].
La piste du microbiote dans la NASH
Le microbiote intestinal joue un rôle très important dans la santé, particulièrement au niveau métabolique (métabolisme énergétique, sensibilité à l’insuline, métabolisme de la choline et des acides biliaires) [6]. On sait que des dysbioses (déséquilibre de la microflore) induisent de l’inflammation de bas grade et peuvent conduire à l’insulinorésistance. Des études sur la souris ont montré un effet protecteur des probiotiques sous forme de lactobacilles et bifidobactéries (surtout pour ces dernières), induisant une baisse de la stéatose et d’agents inflammatoires tels que LPS, TNF-α et IL-6 [6]. On peut donc conseiller une assiette à forte dominante végétale, source de prébiotiques, éventuellement une complémentation en prébiotiques et probiotiques, bien que pour ces derniers des études chez l’homme sont encore requises. Les acides gras oméga-3 sont aussi des modulateurs du microbiote. Dans des études animales on a pu noter que la bactérie anti-obésité Akkermansia était augmentée avec une supplémentation en huile de poisson. L’huile de perilla a aussi un intérêt dans la NASH car elle réduit la stéatose et l’inflammation, mais reste un peu moins efficace que l’huile de poisson (Akkermansia augmentée seulement dans le groupe huile de poisson et pas pour le groupe perrila dans une étude sur des rats) [7].
Conclusion
Le traitement de la stéatose hépatique non alcoolique est avant tout nutritionnel : une alimentation à dominante végétale, à charge glycémique basse et riche en oméga-3 est requise. Différents compléments alimentaires (oméga-3 longues chaînes, tocotriénols, prébiotiques et probiotiques, plantes hépatoprotectrices) pourront aussi être envisagés.
Références
- K Sato et al. Vitamin E has a beneficial effect on nonalcoholic fatty liver disease: A meta-analysis of randomized controlled trials. Nutr J 2015; Jul–Aug Vol31:923–30.
- Magosso E, Ansari MA, Gopalan Y, Shuaib IL, Wong JW, Khan NA, Abu Bakar MR, Ng BH, Yuen KH. Tocotrienols for normalisation of hepatic echogenic response in nonalcoholic fatty liver: a randomised placebo-controlled clinical trial. Nutr J 2013 Dec 27;12(1):166.
- Periasamy S, Chien SP, Chang PC, Hsu DZ, Liu MY. Sesame oil mitigates nutritional steatohepatitis via attenuation of oxidative stress and inflammation: a tale of two-hit hypothesis. J Nutr Biochem 2014 Feb;25(2):232-40.
- Parker HM, Johnson NA, Burdon CA, Cohn JS, O’Connor HT, George J. Omega-3 supplementation and non-alcoholic fatty liver disease: a systematic review and meta-analysis. J Hepatol 2012 Apr;56(4):944-51.
- Abenavoli L, Bellentani S. Milk thistle to treat non-alcoholic fatty liver disease: dream or reality? Expert Rev Gastroenterol Hepatol 2013 Nov;7(8):677-9.
- He X, Ji G, Jia W, Li H. Gut Microbiota and Nonalcoholic Fatty Liver Disease: Insights on Mechanism and Application of Metabolomics. Int J Mol Sci 2016 Mar 15;17(3).
- Tian Y, Wang H, Yuan F, Li N, Huang Q, He L, Wang L, Liu Z. Perilla Oil Has Similar Protective Effects of Fish Oil on High-Fat Diet-Induced Nonalcoholic Fatty Liver Disease and Gut Dysbiosis. Biomed Res Int. 2016;2016:9462571.