Viktor Frankl écrivit : « Le chercheur ne voit plus l’arbre de la réalité derrière la forêt des résultats de la science ».
Nous ne percevons jamais qu’une partie de la réalité. Plus nous nous concentrons sur un aspect, plus notre vue d’ensemble se rétrécit. (…) Cela engendre inévitablement une méconnaissance du global et des interconnexions générales.
Le but de mon ouvrage est de donner une vue d’ensemble à partir d’images isolées. Ceci n’est possible que dans une certaine mesure car, moi aussi comme auteur, je suis victime d’un certain aveuglement spécifique: errare humanum est. La clarté de la vue d’ensemble de cet ouvrage, comme la présentation des diverses contradictions diététiques surprendront cependant le lecteur à l’esprit critique.
Vivons-nous vraiment toujours plus longtemps ?
Si on en croit les médias, les assurances vie et l’industrie pharmaceutique, ces progrès sont considérables et nous vivons plus longtemps que nos ancêtres.
Cependant, aux USA, où le mode de vie occidental est poussé à l’extrême, l’espérance de vie n’augmente plus, mais est en recul surtout dans les classes défavorisées (…) (Olshansky et al., 2012). Ceci peut nous donner un avant-goût de ce qui arrivera dans une Europe affaiblie économiquement et mal nourrie ou suralimentée.
Pouvons-nous combiner les avantages de la modernité avec les découvertes scientifiques actuelles de telle sorte que non seulement nous prolongions la vie mais que nous la prolongions en bonne santé ?
Les avis sur ce qu’est une alimentation saine sont contradictoires et même opposés. Pendant tout un temps, on a cru qu’une alimentation pauvre en graisse était le remède miracle. Un coup dur pour l’industrie du lait et de la viande (…). On a créé de nouveaux produits : un peu plus pauvres en graisse et souvent sucrés. Cela n’a évidemment servi à rien, mais a encore aggravé la situation (…).
Puis vint la « nouvelle » découverte : le sucre et la farine blanche aussi font grossir ! (…) La protéine animale conservait l’aura de la protéine haut de gamme bien que les études montrent clairement que seules les sources de protéines végétales ont à la longue des effets positifs. (…)
Par un bon marketing, des répétitions fréquentes et l’omission ciblée de l’autre aspect de la vérité, des vérités partielles correctes deviennent des religions et des vérités absolues. (…) J’ai constaté à quel point j’étais moi-même influencé par ces courants dans mon modèle alimentaire. Peu à peu, j’ai jeté l’une ou l’autre de ces croyances par-dessus bord.
Le but de ce livre est de contribuer à une amélioration de la santé générale en traduisant des connaissances scientifiquement établies en un mode d’alimentation bénéfique et en les rendant utilisables par tous. Sur les bases, il est dès lors possible de corriger ainsi « des erreurs alimentaires » typiques (…).
L’ammoniaque, la plus forte des auto-toxines
Il se forme principalement dans l’intestin
Chez les personnes saines, la flore intestinale est un milieu vital légèrement acide qui offre des conditions optimales pour les Bifidobactéries et Lactobacilles. En revanche, des champignons pathogènes (Candida spp., Aspergillus spp.) et des bactéries saprophytes (par exemple, Clostridium spp.) se développent dans le gros intestin alcalin.
L’intestin héberge dix fois plus de bactéries que le nombre total de cellules humaines. Les bactéries intestinales, dont il existe plus de 500 types, peuvent nous inonder de nombreux métabolites sains ou toxiques (Werk, 2007).
La composition de la flore intestinale, une fois de plus fortement influencée par l’alimentation, est donc décisive.
L’alimentation actuelle, en général riche en viandes et pauvre en fibres ainsi que l’utilisation fréquente d’antibiotiques, notamment pour produire de la viande, entraînent une diminution importante des bactéries intestinales saines et une augmentation problématique de germes telles les souches clostridiennes et bactéroïdes. Les acides biliaires primaires métabolisés comme l’acide cholique et l’acide chénodésoxycholique ou les acides secondaires tels les acides désoxycholique et lithocholique ont un lien avec le cancer du gros intestin (Horie et al., 1999).
Si le pH est inférieur à 6, les enzymes bactériennes nécessaires à la transformation ne peuvent se former. Par contre, dans un milieu naturel légèrement acide, la flore intestinale saine l’emporte sur les souches dangereuses.
Typiquement, beaucoup de germes intestinaux ne sont ni bons ni mauvais mais ils produisent des métabolites bénéfiques ou nocifs en fonction du milieu nutritif dans lequel ils se trouvent. Le même germe peut donc avoir des effets totalement opposés. Le milieu intestinal influencé par l’alimentation socialise les germes.
Étant donné l’augmentation des germes multi-résistants, il est nécessaire de porter un regard critique sur la consommation de viande. En effet, les aliments dont se nourrissent les animaux dans le monde entier contiennent de grandes quantités d’antibiotiques. En consommant de la viande, on absorbe en permanence des germes multi-résistants mais aussi des résidus d’antibiotiques qui « développent » des germes multi-résistants au sein de la flore intestinale. Une étude étasunienne réalisée par Andrew et al. (2011) a montré que 47% des échantillons de viande étasunienne, y compris la volaille, était contaminé par le Staphylocoque doré. 52% de ces échantillons contaminés était même colonisé par des bactéries multi-résistantes (BMR).
La forte augmentation des maladies auto-immunes, des inflammations chroniques, des intolérances (au lait, aux céréales) et des allergies est directement liée à la hausse d’un microbiote intestinal dysbiotique car l’intestin est le lieu central où se forme le système immunitaire.
Le cercle vicieux entéro-hépatique
Plus la consommation de protéines est élevée, plus le gros intestin est alcalin et plus la charge en ammoniaque est élevée pour le foie.
À cause de ce milieu basique, l’ammoniaque est presque totalement chassé de l’intestin, acheminé vers le foie, épuré par le cycle de l’urée et transformé en glutamine. Un cinquième du volume de l’urée est soumis au recyclage entéro-hépatique. Les bactéries intestinales qui forment l’urée sont décomposées en ammoniaque et en dioxyde de carbone (Cummings, 1975). Plus l’intestin est basique, plus il est difficile d’évacuer l’ammoniaque dans les selles.
Par contre, l’ammoniaque uniquement présent sous forme de sel d’ammonium dans un milieu intestinal sain et légèrement acide, est difficilement résorbable en raison de sa polarité. Il est donc 400 fois mieux évacué dans les selles que l’ammoniaque et peut échapper au recyclage entéro-hépatique (Cohen et al., 1988) (voir figure 12).
En tant que base forte, l’ammoniac alcalinise le gros intestin. Ceci favorise la dysbiose intestinale dont les métabolites entraînent une autre surcharge du foie car les champignons fermentent le sucre en alcools de fusel toxiques et les bactéries de putréfaction forment d’autre toxines cellulaires nocives pour le foie (par exemple du scatol, des cadavérines issus de protéines animales) (voir fig. 13).
Comment détoxifier l’ammoniac ?
Réponse dans le livre « Nutrition Raisonnée » du Dr. L. M. Jacob ;)
Extraits tirés du livre "La nutrition raisonnée" - Page 1, 87 et 88
Découvrez tous les extraits du livre « La Nutrition Raisonnée », de Dr. Jacob