Le PEA (palmitoyléthanolamide), substance endogène et non toxique, existant aussi sous forme de nutraceutique, pourrait avoir un intérêt pour les patients atteints de la COVID-19, de par ses propriétés anti-inflammatoires et immunomodulatrices démontrées.
L’immunomodulation par le PEA et son intérêt dans COVID-19
Le principal effet immunomodulateur du PEA semble être lié aux mastocytes, qui sont généralement impliqués dans les infections respiratoires causées par les coronavirus, ou d’autres virus comme celui de la grippe.
De nombreux organes peuvent être atteints par l’infection à COVID-19 :
- Les poumons sont les plus touchés, mais d’autres organes peuvent être atteints et les manifestations extra-respiratoires sont nombreuses ;
- Des complications cardiaques telles qu’insuffisance cardiaque aiguë, myocardite, arythmie ;
- Des symptômes gastro-intestinaux tels que diarrhées, nausées, vomissements et douleurs abdominales ;
- Des lésions hépatiques avec des taux élevés de transaminases (ASAT et ALAT) ;
- Des éruptions et lésions cutanées ;
- Enfin des manifestations neurologiques ont également été documentées, telles que la perte de l’odorat et du goût, les maux de tête et les étourdissements.
Toutes les lésions organiques graves observées dans l’infection par le SARS-CoV-2 sont principalement caractérisées par un processus inflammatoire.
L’intérêt du PEA est le fait qu’il est capable d’inhiber la libération et l’action des mastocytes, de réduire l’expression de la COX-2 (enzyme favorisant la formation d’éicosanoïdes inflammatoires) et de l’oxyde nitrique synthase (iNOS) et de contrecarrer la libération de protéases pro-inflammatoires, d’histamine, de cytokines, et les chimiokines (qui sont également impliquées dans COVID-19).1
Il est à noter également que l’efficacité et l’innocuité du PEA dans le traitement de la grippe et du rhume ont été démontrées par 6 essais cliniques contrôlés randomisés en double aveugle contre placebo, soit sur environ 4 000 individus.2
Les mécanismes anti-inflammatoires du PEA
Le PEA exerce des actions anti-inflammatoires et antalgiques sur différentes cibles cellulaires et moléculaires comme :
- les canaux potassiques sensibles à l’ATP ;
- les canaux TRPV1 ;
- la signalisation de NF-kappaB ;
- les récepteurs GPR55 ;
- et les PPARα.
De plus, le PEA possède une structure biochimique similaire aux endocannabinoïdes classiques. Par un phénomène dit « d’effet d’entourage » il neutralise leur dégradation, ce qui renforce leurs effets et augmente leur concentration dans l’organisme. En termes plus simples, en plus de ses effets directs, le PEA agit indirectement sur le système endocannabinoïde en augmentant les molécules produites naturellement par l’organisme. |
Lutter contre l’inflammation des poumons (et éviter la fibrose), le stress oxydatif et la neuro-inflammation sont les enjeux potentiel du traitement adjuvant par le PEA en cas de COVID-19.
Le SARS-CoV-2 prive indirectement l’organisme de PEA
Le SARS-CoV-2 consomme les phospholipides membranaires des cellules infectées, pour équiper sa propre enveloppe. La conséquence de ceci est que l’organisme souffre alors d’un déficit aigu en précurseur (phosphatidyléthanolamine) pour synthétiser le PEA endogène, indispensable au contrôle de la neuro-inflammation et de l’hyperréactivité systémique. Prendre du PEA « exogène » en complément alimentaire permet finalement de compenser efficacement ce phénomène.
Le potentiel antiviral du PEA contre le SARS-CoV-2
Une étude publiée en mai 2022 a mis en lumière l’effet antiviral spécifique du PEA
contre le SARS-Cov-2.3 Il y aurait deux mécanismes distincts :
- Il se lie à la Spike Protein, ce qui provoque une baisse de l’infection virale d’environ 70 %. Il a été démontré que cette activité est spécifique du SARS-CoV-2, car elle n’empêche pas l’infection par le VSV ou le HSV-2, d’autres virus enveloppés qui utilisent différentes glycoprotéines et récepteurs pour entrer dans la cellule ;
- A l’intérieur des cellules infectées le traitement au PEA démantèle les gouttelettes lipidiques, empêchant l’utilisation de ces corps vésiculaires par le SARS-CoV-2 comme source d’énergie et de protection contre les défenses cellulaires innées.
Les chercheurs ont conclu à des effets antiviraux directs et indirects du PEA sur le SARS-Cov-2.
De la théorie à la pratique : les études cliniques
- Rapport de cas d’une patiente
En Italie, une patiente COVID-19 âgée de 45 ans, polyallergique, testée positive au test antigénique puis confirmée positive par PCR, s’est vu prescrire une spécialité contenant 300 mg de PEA micronisé + 600 mg de PEA ultra-micronisé en comprimés, 3 fois par jour jusqu’à la négativation du PCR survenue 17 jours après les premiers symptômes (maux de tête, douleurs musculaires, toux…). Compte tenu de l’absence de comorbidités, la patiente a été renvoyée à son domicile en quarantaine, où elle a immédiatement commencé la prise de PEA sous surveillance médicale, avec du paracétamol si besoin. L’évolution de la maladie a été favorable, sans fièvre, saturation normale en oxygène et sans perte d’odorat ou du goût. D’après les auteurs du protocole l’objectif principal est de traiter le patient dès l’apparition des premiers symptômes, afin de prévenir l’apparition d’un état hyper-inflammatoire, qui devient alors difficile à gérer, notamment chez les patients âgés et fragiles.4
- Une étude pilote sur l’altération olfactive
Une étude pilote randomisée a été mené chez 12 patients ayant des antécédents de COVID-19, avec une altération olfactive post-infection qui a persisté plus de 90 jours après un test négatif. Les patients ont été répartis au hasard pour recevoir deux fois par jour une rééducation olfactive seule (5 sujets), ou une rééducation olfactive hebdomadaire avec un complément alimentaire quotidien composé de PEA et de lutéoline (7 sujets). Les évaluations olfactives ont été effectuées au départ et 30 jours après le traitement.5
Les résultats ont montré que le traitement combinant la réhabilitation olfactive avec une supplémentation PEA / lutéoline était associé à une meilleure récupération de la fonction olfactive, par ailleurs plus marquée chez les patients présentant un dysfonctionnement olfactif de longue date.
- Une étude sur 90 patients
Une étude a recruté 90 patients avec un diagnostic confirmé de COVID-19 (asymptomatiques et légèrement symptomatiques). Les sujets ont été randomisés en deux groupes. Le premier a reçu une supplémentation orale à base de PEA ultra-micronisé à la dose de 1800 mg par jour, pendant 28 jours. Le deuxième groupe servait de témoin (sans traitement).6
A l’issu des 28 jours le groupe traité au PEA a présenté une réduction significative de l’inflammation par rapport au groupe témoin. Ces derniers ont montré une augmentation significative du stress oxydatif par rapport au groupe PEA.
A la fin de la période de traitement, le groupe PEA, comparativement aux témoins, a présenté une diminution significative des niveaux de D-dimères (marqueur de l’activation de la coagulation et du risque de caillots) et des niveaux plus élevés d’anticorps IgG dirigés contre le SRAS-CoV-2 !
En conclusion
Le PEA pris précocement chez des sujets COVID-19 peu symptomatiques permet de réduire l’inflammation, le stress oxydatif et les altérations de la coagulation. Par ailleurs il permet une meilleure récupération de l’odorat.
Références
- Noce A, Albanese M, Marrone G, Di Lauro M, Pietroboni Zaitseva A, Palazzetti D, Guerriero C, Paolino A, Pizzenti G, Di Daniele F, Romani A, D’Agostini C, Magrini A, Mercuri NB, Di Daniele N. Ultramicronized Palmitoylethanolamide (um-PEA): A New Possible Adjuvant Treatment in COVID-19 patients. Pharmaceuticals (Basel). 2021 Apr 6;14(4):336.
- Keppel Hesselink JM, de Boer T, Witkamp RF. Palmitoylethanolamide: A Natural Body-Own Anti-Inflammatory Agent, Effective and Safe against Influenza and Common Cold. Int J Inflam. 2013;2013:151028.
- Fonnesu R, Thunuguntla VBSC, Veeramachaneni GK, Bondili JS, La Rocca V, Filipponi C, Spezia PG, Sidoti M, Plicanti E, Quaranta P, Freer G, Pistello M, Mathai ML, Lai M. Palmitoylethanolamide (PEA) Inhibits SARS-CoV-2 Entry by Interacting with S Protein and ACE-2 Receptor. Viruses. 2022 May 17;14(5):1080.
- Roncati L, Lusenti B, Pellati F, Corsi L. Micronized / ultramicronized palmitoylethanolamide (PEA) as natural neuroprotector against COVID-19 inflammation. Prostaglandins Other Lipid Mediat. 2021 Jun;154:106540.
- D’Ascanio L, Vitelli F, Cingolani C, Maranzano M, Brenner MJ, Di Stadio A. Randomized clinical trial « olfactory dysfunction after COVID-19: olfactory rehabilitation therapy vs. intervention treatment with Palmitoylethanolamide and Luteolin »: preliminary results. Eur Rev Med Pharmacol Sci. 2021 Jun;25(11):4156-4162.
- Albanese M, Marrone G, Paolino A, Di Lauro M, Di Daniele F, Chiaramonte C, D’Agostini C, Romani A, Cavaliere A, Guerriero C, Magrini A, Mercuri NB, Di Daniele N, Noce A. Effects of Ultramicronized Palmitoylethanolamide (um-PEA) in COVID-19 Early Stages: A Case-Control Study. Pharmaceuticals (Basel). 2022 Feb 19;15(2):253.